Antennes Relais dispositions illégales du PLU atteinte à la liberté du commerce et de l'industrie

Franck Martin
15 Décembre 2023

antennes relais illégalité PLU : atteinte à la liberté d'entreprendre

Dans une décision rendue le 23 novembre 2023, la Cour Administrative d'appel de Douai (1ère Chambre, 23 novembre 2023, n° 22DA00613) sollicite l'abrogation des dispositions du PLU de la métropole Rouen Normandie qui interdisaient l'installation de nouvelles antennes relais dans un rayon de moins de 100 mètres autour des établissements sensibles tels que les hôpitaux, les maternités et les établissements accueillant des enfants. 

Le PLU vu par la Métropole Rouen Normandie

La métropole Rouen Normandie justifiait sa position sur les éléments suivants :
La sécurité et la salubrité publiques
La prévention des risques technologiques, des pollutions et des nuisances de toute nature 
Pour la métropole, ces arguments étaient étayés par différentes dispositions du code de l'urbanisme qui autorisent les collectivités territoriales à prendre des mesures de prévention des nuisances, notamment en matière d'urbanisme. Pour justifier sa décision d'interdiction dans le PLU, la métropole se référait à une instruction du 15 avril 2013 émanant du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie relative à " l'urbanisme à proximité des lignes de transport d'électricité mais aussi à des extraits d'avis du 13 mars 2018 et du 5 avril 2019 de l'Agence nationale de sécurité sanitaire. Cette interdiction des antennes relais à moins de cent mètres des établissements sensibles étaient donc, selon elle, licites et visaient à limiter l'exposition aux champs électromagnétiques des populations les plus sensibles comme par ailleurs précisé dans son rapport de présentation.

La censure de la Cour Administrative d'Appel de Douai

La cour a jugé que les arguments avancés par la métropole Rouen Normandie pour justifier cette interdiction étaient insuffisants. En effet, la métropole ne pouvait se référer à l'instruction du 15 avril 2013 relative à l'urbanisme à proximité des lignes de transport d'électricité, puisque cette instruction concernait uniquement l'implantation de structures de transport d'électricité à haute et très haute tension émettant un champ magnétique sans aucune mesure avec celle des antennes relais qui sont par ailleurs réglementées en France par le décret du 3 mai 2002. Pour rappel ce décret fixe des limites strictes quant aux niveaux d'exposition aux champs électromagnétiques émis par les antennes relais. Ces limites sont basées sur les recommandations de la Commission internationale de protection contre les rayonnements non ionisants (ICNIRP). Ainsi, les antennes relais sont soumises à des normes strictes qui garantissent leur innocuité pour la santé des personnes dès lors que ces limites sont respectées.
En outre, la métropole n'était pas en mesure de fournir des éléments précis et circonstanciés permettant de justifier localement cette interdiction d'implantation des antennes relais près des établissements sensibles. S'il est vrai que l'Agence nationale de sécurité sanitaire reconnait notamment l'existence d'une hypersensibilité électromagnétique liée aux champs électromagnétiques pour certaines personnes, elle n'établit pas pour autant un lien de causalité entre les symptômes et la présence des antennes relais et la métropole ne rapporte aucun élément tangible en ce sens pouvant justifier l'interdiction. 
Par ailleurs, la Cour écarte d'elle-même l'application du principe de précaution en précisant que la métropole Rouen Normandie ne produit aucun élément circonstancié faisant apparaître, en l'état des connaissances scientifiques, des risques, même incertains, qui seraient de nature à justifier les restrictions litigieuses d'implantation des antennes relais de téléphonie mobile dans son PLU.
Enfin, selon la Cour, ces dispositions du PLU portent une atteinte excessive non justifiée à la liberté du commerce et d'industrie des sociétés à l'activité des opérateurs de téléphonie mobile qui exploitent, dans le cadre des autorisations qui leur sont délivrées, des réseaux de téléphonie mobile en conformité avec leurs obligations et notamment celles fixant les valeurs limites d'exposition aux champs électromagnétiques.
En conclusion, la décision de la cour met en évidence le fait que la métropole Rouen Normandie n'a pas réussi à justifier de manière suffisamment convaincante l'interdiction d'implantation des antennes relais près des établissements sensibles. En se basant sur une instruction qui ne s'applique pas aux antennes relais et en n'apportant pas de preuves tangibles des risques pour la santé, ces dispositions du PLU de la métropole de Rouen Normandie ont été jugées comme étant illégales et pris en violation de la liberté du commerce et d'industrie des sociétés exploitant des réseaux de téléphonie mobile.

Antennes relais et atteinte à la liberté du commerce et de l'industrie dans le PLU

CetteFondement juridique

Le principe de la liberté du commerce et de l'industrie découle de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, qui stipule que : "La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui." Il a été depuis consacré à maintes reprises par la réglementation et a valeur constitutionnelle depuis 1982.
Cette liberté n'est évidemment pas absolue. Elle peut être restreinte par la loi, pour des raisons d'intérêt général, comme la préservation de la santé publique, de l'environnement ou de la sécurité publique. Les limitations à la liberté de commerce et d'industrie doivent être appropriées à l'objectif poursuivi et ne doivent pas constituer une atteinte excessive à cette liberté. La Cour administrative de Douai a donc dû évaluer si les différentes dispositions du PLU de Rouen Normandie étaient justifiées et proportionnées. 


Antennes relais et atteinte excessive à la liberté d'entreprendre

La cour retient une atteinte excessive à la liberté de commerce et de l'industrie pour les raisons suivantes :
Les dispositions litigieuses sont disproportionnées et insuffisamment étayées. La métropole Rouen Normandie ne produit pas d'éléments précis et circonstanciés de nature à justifier localement l'interdiction d'implanter des antennes relais.
Les dispositions litigieuses ne sont pas conformes au principe de précaution. Le principe de précaution ne permet pas de prendre des mesures restrictives sans établir une relation causale entre les effets négatifs potentiels et les causes qui les génèrent.
La cour estime que les dispositions litigieuses sont par conséquent entachées d'une erreur d'appréciation et portent une atteinte excessive à la liberté du commerce et de l'industrie.


Conclusion

Cette décision favorable à l'opérateur Bouygues Telecom et au gestionnaire d'infrastructures Cellnex et plus généralement au déploiement des antennes relais ne doit pas occulter l'importance de l'information pour la population qui manifeste souvent des inquiétudes quant au déploiement d'antennes relais à proximité de leur lieu de vie. En effet, la question de l'exposition aux ondes électromagnétiques est un sujet sensible qui mérite une attention particulière de la part de tous les acteurs (opérateurs, mairies ...). 
Dans ce contexte, il est essentiel de rappeler l'existence du dossier d'information mairie prévu par la loi Abeille. Cette loi, adoptée en 2015, instaure pour les opérateurs de téléphonie mobile la transmission d'un dossier d'information à la mairie concernée avant l'installation d'une antenne relais. Ce dossier d'information a pour objectif de permettre à la population d'avoir accès à toutes les informations relatives à un projet. Ce dispositif vise à garantir la transparence et à favoriser le dialogue entre les opérateurs, les autorités locales et la population. Il est donc primordial que les mairies veillent à ce que ces dossiers d'information soient systématiquement communiqués aux habitants concernés et qu'ils soient facilement accessibles. La loi Abeille a ainsi contribué à renforcer la prise en compte des préoccupations des citoyens quant aux antennes relais. Elle reste un outil important pour assurer la transparence, la participation et la protection de la santé publique dans le déploiement des infrastructures de téléphonie mobile. L'interdiction d'antennes relais dans un PLU sur des bases illégales ou à l'occasion d'un arrêté d'opposition qui n'est pas lié à un motif d'urbanisme, est un non sens systématiquement sanctionné par la jurisprudence. 

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